Linguistics
18/05/2022
GRAMMATICAL GENDERS (Français - English)
LINGUISTIQUE
SUR UNE PISTE DE L'ATTRIBUTION DE GENRES GRAMMATICAUX
par Irénée Sikora
Il est évident que le genre grammatical n'est pas sexuel. Toutefois il est fort à propos de se poser la question suivante : pourquoi tel objet est masculin en français, tandis que son équivalent dans une autre langue aura été le contraire comme 'arbre' qui est masculin en français, 'árvore' féminin en portugais et 'drevo' qui est neutre en slovène. Le phénomène est plutôt complexe dans la codification sémantique des mots dans les langages humains. L'humanité expérimente la polarisation depuis la nuit des temps et à notre époque actuelle, elle se met à dépasser la dualité. On se pose donc légitimement ce type de questions.
Le Proto-Sumérien disposait de deux genres : divin et non-divin (ce dernier englobait objets, plantes, animaux et humains). Ce qui veut dire que les humains et les animaux, au tout début, avaient le même statut : non-divin, ce qui est une manipulation de nature à la fois historiquement génétique et psychologique ... Plus tard, en sumérien nous avons le genre humanoïde (englobant dieux et humains) et non-humanoïde.
Dans beaucoup de langues nous avons trois genres grammaticaux : féminin, masculin et neutre, comme en grec, latin, allemand ou dans quelques langues slaves. L'attribution de tel genre à tel objet ou à tel concept est souvent arbitraire. Pour simplifier, un mot qui se termine phonétiquement de manière relativement dure (par une consonne, p.ex. D, T, F etc.) rentrera dans la catégorie masculine, tandis qu'un mot se terminant par un phonème plutôt doux, une voyelle comme p.ex A, sera féminin. Donc en français nous avons 'une villa', 'une pergola', 'une armada', mais 'un visa', ce qui aurait dû être considéré comme illogisme grammatical, il s'agit en l'occurrence d'un document et obtenir un tel document peut s'avérer un parcours administrativement dur, car à tout le moins en français, comme dans de nombreux langages, 'document' est masculin ...
En français nous avons 'la mer' (féminin), en italien 'il mare' (masculin), en russe et en ukrainien 'море' [pron. mOré] (neutre), en polonais 'morze' [pron. mogé] (neutre). Dans le subconscient collectif de l'humanité, 'la mer' devrait être de genre féminin comme 'la terre', 'l'eau', 'l'atmosphère', donc précisément de genre féminin dans les langues où ce mot est d'un autre genre. Ainsi, le mot 'océan' devrait être aussi de genre féminin en français et 'l'air' pareillement de genre féminin, ce que l'italien restitue dans le mot 'aria' qui est féminin. Le 'feu' français qui est donc masculin, a son équivalent néerlandais dans 'vuur' qui est de genre neutre, ce qui, psychologiquement, me semble plus approprié ...
Dans certaines langues les genres grammaticaux masculin et féminin ont quasi fusionné pour ne représenter qu'une seule et même catégorie dénommée 'genre Commun', tout en préservant de côté le genre Neutre. C'est par exemple le cas du norvégien et du néerlandais où les noms sont répartis en deux genres : Commun et Neutre. C'est aussi le cas du suédois et surtout du danois. En norvégien et en néerlandais, certaines personnes sont encore capables de différencier ou ressentir (comme dans le Brabant belge et néerlandais) s'il s'agit d'un mot masculin ou d'un mot féminin, par exemple en néerlandais, "de ruimte" [pron. rAümtè] (espace) est féminin, et "de tijd" [tAït] (temps, ang. time) est masculin. Mais comme il n'y a plus de différence au niveau de l'article, les générations plus jeunes d'aujourd'hui ne savent plus et considèrent sur la base d'un automatisme que chacun de ces deux mots est masculin. Je trouve que c'est dommage, mais telle est la tendance. Pour le nom néerlandais "het huis" [het hAüs] (maison), c'est facile, le mot est de genre neutre, ce que démontre l'article Het. En ce qui concerne le mot 'Espace', il est donc de genre féminin en néerlandais classique, comme en polonais ce mot étant 'Przestrzeń' [pchest-chègne] qui aussi est féminin par rapport au terme polonais 'Czas' [tchas] (temps, ang. time) qui est masculin. A ce propos, considérer l'Espace comme terme féminin, personnellement me semble plus approprié ...
En finnois, malgré le fait que le système de déclinaison témoigne de sa complexité, les substantifs n'ont pas de genre grammatical. Nous le savons, l'anglais a abandonné la répartition en genres.
Relevons que dans une langue telle le français, le genre grammatical (féminin ou masculin) peut receler des listes thématiques de mots. Ici, vous êtes libres de sauter ce passage, encore que ... Par exemple, là où il est question de ce qui se rapporte aux documents a fortiori rédigés par écrit, le masculin l'emporte sur le féminin (évidemment avec des exceptions). De genre masculin sont donc ici les termes suivants : Mot, Nom, Adjectif, Verbe, Proverbe, Vers, Point, Signe, Phonème, Graphème, Lexème, Thème, Sujet, Accent, Tréma, Diacritique (substantif), Écrit (substantif), Manuscrit, Récit, Tracé, Trait, Traité, Relevé, Abrégé, Récépissé, Plumier, Porte-plumes, Buvard, Stylet, Stylo, Tampon, Sceau, Cachet, Crayon, Carton, Calque, Parchemin, Roseau, Rouleau, Papyrus, Papier, Livre, Livret, Libretto, Recueil, Atlas, Carnet, Cahier, Calepin, Cartable, Agenda, Visa, Bloc-Notes, Fascicule, Opuscule, Scriptorium, Marque-Page, Propos, Avant-Propos, Préambule, Chapitre, Paragraphe, Index, Codex, Texte, Contexte (et Prétexte), Synopsis, Scénario, Almanach, Mémento, Roman, Conte, Compte, Acompte, Compte Rendu, Calcul, Compas (et Angle), Chiffre, Nombre, Numéro, Code, Code-barres, Astérisque, Préfixe, Suffixe, Affixe (et bien sûr Astérix avec Obélix), Bilan, Document, Billet, Ticket, Passeport, Acte, Pacte, Bordereau, Écriteau, Panneau, Exposé, Résumé, Catéchisme, Cantique, Évangile, Recensement, Registre, Inventaire, Abécédaire, Bréviaire, Formulaire, Syllabaire, Grimoire, Répertoire, Mémoire (par écrit), Vocabulaire, Dictionnaire, Glossaire, Solfège, Symbole, Lexique, Label, Libelle, Libellé, Panégyrique, Dithyrambe, Manuel, Missel, Journal, Périodique, Hebdomadaire, Mensuel, Bimensuel, Bulletin, Magazine, Titre, Surtitre, Sous-Titre, Article, Encrier, Calendrier, Chéquier, Chèque, Timbre, Album, Classeur, Catalogue, Volume, Tome, Dossier, Permis, Sauf-conduit, Brevet, Certificat, Contrat, Accord, Diplôme, Éditeur, Imprimeur, Colporteur, Distributeur, Écrivain (Écrivaine en tant que néologisme), Chroniqueur, Secrétaire (à l'origine seulement masculin), Scribe, Auteur, (le terme féminin Auteure étant un néologisme orthographique discutable), Parolier, Poète, Poème, Sonnet, Quatrain, Bouquiniste, Libraire ...
Toutefois, dans cette même thématique, au féminin nous disposons de : Lettre, Marge, Colonne, Annexe, Page, Virgule, Brochure, Préface, Prose, Tablette, Licence, Argile, Encre, Strophe, Rime, Écritoire, Bibliothèque, Librairie ... et, bien évidemment les mots se terminant par -ie, -ion, -ure (une sorte d'automatisme dans l'attribution du genre) tels : Copie, Encyclopédie, Psalmodie, Poésie, Citation, Illustration, Annotation, Reliure, Couverture, Écriture, Signature, Censure ...
Je vous invite à chercher d'autres thèmes, par exemple dans le domaine de la technologie, de la médecine, de la juridiction, du voyage, de la gastronomie ...
Pas toutes, mais certaines attributions à tel genre grammatical ont été biaisées, manipulées intentionnellement. Hélas, dans de nombreux cas, ces attributions ont été réalisées au détriment de l'élément féminin, surtout dans les domaines des religions et du pouvoir politique. Dans de très nombreuses langues, 'Dieu' (ang. God) est donc masculin, même en anglais où les genres grammaticaux n'existent plus. Bien évidemment nous disposons du mot 'déesse' (goddess), mais le statut de déesse est de loin inférieur par rapport à Dieu qui, encore dans le subconscient de beaucoup de gens, porte une barbe blanche ... c'est lourd de conséquences ... Par exemple le Saint-Esprit n'aurait pas dû être placé dans la catégorie du genre masculin, mais préservé dans sa catégorie féminine originelle, car ici, à une époque révolue il y a des éons, on a décidé de bannir le féminin, l'ayant trouvé trop puissant, trop beau et pacifique ... Non par hasard ici encore, le féminin a su imprimer sa trace indélébile dans le langage iconographique : le Saint-Esprit est une colombe ...
Ainsi, tout du moins en français, nous avons le maire à la mairie, mais pas la maire. Je ne sais s'il faut bousculer nos injonctions grammaticales, c'est probablement chose trop ardue à réaliser pour ne pas dire irréalisable, mais il sera toujours enrichissant d'être conscientes et conscients de ce type de phénomène linguistique et de nos habitudes sociales et administratives trop souvent irréfléchies.
En ma qualité de linguiste, je vais m'arrêter là aujourd'hui. Quoi qu'il en soit, le sujet est fascinant.
LINGUISTICS
ON A TRAIL OF GRAMMATICAL GENDER ASSIGNMENT
by Irénée Sikora
It is obvious that grammatical gender is not sexual. However, it is worth asking the question why a certain object is masculine in French, while its equivalent in another language would have been the opposite, such as 'arbre' (tree), which is masculine in French, 'árvore', which is feminine in Portuguese, and 'drevo', which is neuter in Slovenian. The phenomenon is rather complex in the semantic coding of words in human languages. Humanity has been experiencing polarisation since the dawn of time, and in our current era, it is moving beyond duality. We are therefore legitimately asking ourselves this type of question.
The Proto-Sumerian had two genders : divine and non-divine (the latter included objects, plants, animals and humans). This means that humans and animals, at the very beginning, had the same status : non-divine, which is a manipulation of a historically genetic and psychological nature ... Later, in Sumerian we have the humanoid (encompassing gods and humans) and non-humanoid genders.
In many languages we have three grammatical genders : feminine, masculine and neuter, as in Greek, Latin, German and some Slavic languages. The assignment of a gender to an object or concept is often arbitrary. To simplify, a word that ends phonetically relatively hard (with a consonant, e.g. D, T, F etc.) will be masculine, while a word ending with a rather soft phoneme, a vowel such as A, will be feminine. So in French we have 'une villa', 'une pergola', 'une armada' (which are feminine), but 'un visa', so a masculine word, which should have been considered a grammatical illogicality. Well, a visa is a document and obtaining such a document can be an administratively hard journey, because in French at least, as in many languages, 'document' is masculine ...
In French we have 'la mer' (feminine for a sea), in Italian 'il mare' (masculine), in Russian and Ukrainian 'море' [pron. mOré] (neuter), in Polish 'morze' [pron. mogé] (neuter). In the collective subconscious of humankind, 'sea' should be feminine like 'earth', 'water', 'atmosphere', thus precisely feminine in languages where this word is of another gender. Thus, the French words 'océan' and 'air', instead of being masculine, should also be feminine, just as the Italian word 'aria' is feminine. The French masculine 'feu' (fire), has its Dutch equivalent in 'vuur', which is gender-neutral, and which, psychologically, seems to me to be more appropriate ...
In some languages the masculine and feminine grammatical genders have been almost merged into a single category called 'Common Gender', while the Neutral Gender has been left aside. This is the case, for example, in Norwegian and Dutch where nouns are divided into two genders : Common and Neutral. This is also the case in Swedish and especially in Danish. In Norwegian and Dutch, some people are still able to differentiate or feel (as in Belgian and Dutch Brabant) whether it is a masculine or feminine word, e.g. in Dutch, "de ruimte" [pron. rAümtè] (space) is feminine, and "de tijd" [tAyt] (time) is masculine. But since there is no longer a difference in the article, the younger generations of today no longer know and automatically consider each of these two words to be masculine. I think it is a pity, but that is the trend. For the Dutch noun 'het huis' [het hAüs] (house), it's easy, the word is gender-neutral, as the article Het shows. As for the word 'Space', it is therefore feminine in classical Dutch, as in Polish this word being 'Przestrzeń' [pshest-shèng] which is also feminine compared to the Polish term 'Czas' [tchas] (time) which is masculine. By the way, considering Space as a feminine term, personally, seems to me more appropriate ...
In Finnish, despite the fact that the declension system shows its complexity, nouns do not have a grammatical gender. As all of us do know, English has abandoned the gender classification of nouns.
It should be noted that in a language such as French, the grammatical gender (feminine or masculine) can conceal thematic lists of words. If you are interested in French, this could be useful for you, otherwise, you are free to skip this short chapter. So ... For example, where it is a question of what relates to documents, a fortiori written materials, the masculine gender prevails over the feminine one (obviously with exceptions). Here, Masculine are : Mot, Nom, Adjectif, Verbe, Proverbe, Vers, Point, Signe, Phonème, Graphème, Lexème, Thème, Sujet, Accent, Tréma, Diacritique (noun), Écrit (noun), Manuscrit, Récit, Tracé, Trait, Traité, Relevé, Abrégé, Récépissé, Plumier, Porte-plumes, Buvard, Stylet, Stylo, Tampon, Sceau, Cachet, Crayon, Carton, Calque, Parchemin, Roseau, Rouleau, Papyrus, Papier, Livre, Livret, Libretto, Recueil, Atlas, Carnet, Cahier, Calepin, Cartable, Agenda, Visa, Bloc-Notes, Fascicule, Opuscule, Scriptorium, Marque-Page, Propos, Avant-Propos, Préambule, Chapitre, Paragraphe, Index, Codex, Texte, Contexte (and Prétexte), Synopsis, Scénario, Almanach, Mémento, Roman, Conte, Compte, Acompte, Compte Rendu, Calcul, Compas (and Angle), Chiffre, Nombre, Numéro, Code, Code-barres, Astérisque, Préfixe, Suffixe, Affixe (and of course Asterix with Obelix), Bilan, Document, Billet, Ticket, Passeport, Acte, Pacte, Bordereau, Écriteau, Panneau, Exposé, Résumé, Catéchisme, Cantique, Évangile, Recensement, Registre, Inventaire, Abécédaire, Bréviaire, Formulaire, Syllabaire, Grimoire, Répertoire, Mémoire (in writing), Vocabulaire, Dictionnaire, Glossaire, Solfège, Symbole, Lexique, Label, Libelle, Libellé, Panégyrique, Dithyrambe, Manuel, Missel, Journal, Périodique, Hebdomadaire, Mensuel, Bimensuel, Bulletin, Magazine, Titre, Surtitre, Sous-Titre, Article, Encrier, Calendrier, Chéquier, Chèque, Timbre, Album, Classeur, Catalogue, Volume, Tome, Dossier, Permis, Sauf-conduit, Brevet, Certificat, Contrat, Accord, Diplôme, Éditeur, Imprimeur, Colporteur, Distributeur, Écrivain (Écrivaine as a neologism), Chroniqueur, Secrétaire (originally only male), Scribe, Auteur (the feminine term Auteure being a questionable spelling neologism), Parolier, Poète, Poème, Sonnet, Quatrain, Bouquiniste, Libraire ...
However, in this same theme, in the feminine we have : Lettre, Marge, Colonne, Annexe, Page, Virgule, Brochure, Préface, Prose, Tablette, Licence, Argile, Encre, Strophe, Rime, Écritoire, Bibliothèque, Librairie ... and, of course, words ending in -ie, -ion, -ure (a kind of automatism in the assignment of gender) such as : Copie, Encyclopédie, Psalmodie, Poésie, Citation, Illustration, Annotation, Reliure, Couverture, Écriture, Signature, Censure ...
I invite you to look for other themes in French, for example in the field of technology, medicine, jurisdiction, travel, gastronomy ...
Not all of them, but some of the assignments to such and such a grammatical gender have been biased, intentionally manipulated. Unfortunately, in many cases, these assignments have been made to the detriment of the feminine component, especially in the fields of religion and political power. In many languages, 'God' is therefore masculine, even in English where grammatical genders no longer exist. Of course we have the word 'goddess', but the status of goddess is far inferior to that of God, who, in the subconscious of many people still wears a white beard ... this has serious consequences ... For example, the Holy Spirit should not have been placed psychologically and grammatically in numerous languages in the male gender category, but preserved in her original female category, because here, in a time eons ago, it was decided to banish the feminine, having found it too powerful, too beautiful and peaceful ... Not by coincidence here again, the feminine has left her indelible imprint in the iconographic vocabulary : the Holy Spirit is a dove ...
So, at least in French, we have le maire at la mairie, but not la maire. I don't know if we should shake up our grammatical injunctions, it's probably too hard to do, not to say unachievable, but it will always be enriching to be aware of this kind of linguistic phenomenon and of our too often thoughtless social and administrative habits.
As a linguist, I will stop here today. However, the subject is fascinating.
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